mercredi 23 décembre 2015

PAPE DIOUF SUR L’AFFAIRE LAMINE DIACK: ‘’Le Monde nous apprend des choses que Lamine Diack a de toute façon dites’’


De passage à Dakar, l’ancien président de l’Olympique de Marseille Pape Diouf en a profité pour se prononcer sur l’actualité sportive. Il estime que l’affaire Lamine Diack est très troublante et triste pour une personne que tout le monde adulait.
 L’ancien président de l’Olympique de Marseille, Pape Diouf, estime que les révélations du Journal Le Monde sont troublantes. Invité hier à s’entretenir avec les étudiants du Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti), dans le cadre des ‘’carrefours d’actualité’’, il estime que les propos attribués à Lamine Diack viennent vraisemblablement de lui.
‘’Effectivement, Le Monde nous apprend des choses que Lamine Diack a de toute façon dites. Il faut savoir quand un journal fait référence à des procès-verbaux (PV), c’est comme une interview enregistrée. Ce sont des propos que la personne a tenus et signés ‘’, a-t-il précisé. Selon lui, cette deuxième affaire a été troublante pour tous ceux qui ont de l’amitié et de l’admiration pour l’ancien président de l’IAAf. Pape Diouf déclare : ‘’Pour ma part, j’avoue que je ne suis pas dans les conditions requises pour avoir toutes les informations. Mais à la lueur des éléments fournis par Le Monde, oui il y a de la matière à se poser des questions sur la culpabilité de Lamine Diack. Jusqu’ici, j’étais, comme la majorité des gens, très prudent sur la ligne de conduite à adopter, mais aujourd’hui je suis un peu plus inquiet pour lui.’’
L’affaire Lamine Diack semble avoir ému tout le monde. Et aux yeux de l’ancien président de l’OM, c’est un coup de tonnerre qui s’est abattu sur tous les amis et admirateurs de l’ancien maire de Dakar. Interpellé sur l’attitude que la presse sénégalaise a adoptée et que certains jugent trop favorable, il répond : ‘’Moi-même quand j’ai eu l’information en France, d’abord la tristesse m’a gagné puis l’étonnement. Voilà un homme que nous tous adulions par rapport à son parcours, à tout ce qu’il a eu à représenter. Subitement il est sous le feu des projecteurs judiciaires de manière où l’infamie n’est pas très loin. Evidemment pour nous tous, le coup était difficile à encaisser. Il fallait comprendre avant de traiter ce qu’on peut appeler une information mastoc.’’
Dans une salle pleine à craquer, le  Marseillais a été soumis à toutes les questions possibles. Parallèlement au traitement des médias sénégalais, il s’est prononcé sur celui de la presse française pointée du doigt par certains compatriotes de l’accusé. Sur cette question, M. Diouf s’est voulu clair : ‘’Dire que la presse française a voulu faire du tort ou éclabousser le pouvoir au Sénégal, je pense que c’est une position exagérée. Je connais beaucoup de journalistes du Monde avec qui je collabore souvent comme les deux auteurs de l’article. Ils se sont spécialisés en matière de faits divers. Ils mènent généralement des enquêtes assez rigoureuses. Quand on parle de Lamine, n’oubliez pas qu’en France, la presse n’a jamais épargné la classe politique. Tout dernièrement, un ancien président de la République a fait l’objet de mise en examen en l’occurrence Nicolas Sarkozy’’, a-t-il expliqué aux journalistes en herbe. Poursuivant son argumentaire, Pape Diouf soutient qu’on ne peut pas quand même dire qu’il y a une sorte de sélection à la tête du client de la part des médias français.
‘’Je crois qu’à aucun moment la presse française n’a voulu salir le pouvoir au Sénégal parce qu’il n’y avait pas de raisons de le faire. Même si la presse française par ailleurs s’est montrée conciliante, parfois un peu trop conciliante comme lorsqu’il fallait commenter les démêlés de Platini à la Fifa et  à la justice. Il y a une sorte d’attentisme général qui veut aujourd’hui que Platini comme Zidane soient des personnes nécessairement à protéger’’, a expliqué l’hôte du Cesti.
Le monde du sport éclaboussé par des scandales à répétiton, les étudiants en ont profité pour poser le débat concernant la transparence dans  ce domaine fermé. Selon l’ancien agent de joueurs, il y a un manque de transparence dans le milieu du sport. Explications : ‘’La Fifa et les grandes instances du sport pensent qu’ils sont au-dessus de tout contrôle judiciaire jusqu’à ce qu’éclatent les scandales. Je pense que maintenant ces affaires de la Fifa et l’IAAF seront des leçons pour ceux qui viendront.’’
Journaliste et enseignant en journalisme en France, Pape Diouf est aussi revenu sur ce métier assez particulier. Il a exprimé son regard sur la presse sénégalaise et la pratique du journalisme dans notre pays. ‘’Le journalisme au Sénégal, je pense que c’est un métier très compliqué. Il y a certes de bons journaux et de bons journalistes, très bien formés. Après il y a effectivement un contexte qui ne favorise pas l’éclosion et ne permet pas aux journalistes de livrer véritablement leurs talents’’, a-t-il dit. Avant d’ajouter : ‘’Lorsque j’étais journaliste à ‘’La Marseillaise’’ ensuite au quotidien ‘’Le Sport’’ et que je devais suivre l’équipe de France à l’extérieur, c’est mon journal qui payait mon billet d’avion, de taxi et d’hôtel. La Rédaction prenait en charge  toutes les dépenses pour que je puisse effectuer mon travail. J’avais donc la liberté totale et absolue d’écrire ce que je pense.
Lorsqu’en Afrique pas seulement au Sénégal, le journaliste dans son désir de faire son métier doit se rendre à l’étranger et que son journal n’a pas les moyens. Et qu’il doit être transporté par un ministère qui lui paye son billet et son hôtel, il est déjà moins libre que moi je l’étais. C’est déjà compliqué pour les journalistes. Ce manque économique empêche les gens d’aller jusqu’au bout de ce qu’ils veulent faire. Il faut du courage pour faire du journalisme ici. Il faut essayer de sortir de ce double piège des forces occultes et des pouvoirs politiques. N’oublions pas que quand un ministre vous transporte et vous nourrit, il n’attend pas à ce que vous écrivez un papier qui le flingue. On a aussi tendance à subir l’influence des personnes qui peuvent faire des choses pour nous. Et là je peux comprendre que quand on est dans certains journaux et qu’on reste pendant des mois sans être payé, on risque d’être très vulnérable et céder à la première tentation’’, a expliqué Pape Diouf à ses futurs confrères.
 En présence du directeur du Cesti Ibrahima Sarr et de Mamadou Koumé formateur à la même école, il pense aussi qu’il y a un travail à faire sur les maquettes qui peuvent aider à avoir un bon journal plus clair et plus lisible. ‘’Le véritable métier que j’ai pratiqué jusqu’ici, c’est le journalisme. Je suis journaliste et je le reste ‘’, a conclu l’ancien président de l’OM sous les applaudissements des étudiants du Cesti.
                                                                                                             ABDOURAHIM BARRY

lundi 21 décembre 2015

SORTIE DE LA 43ème PROMOTION DU CESTI: Les nouveaux diplômés invités à suivre la voie du défunt Alioune Fall


Le Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti) a mis sur le marché du travail 22 nouveaux journalistes. Lors de la cérémonie de remise des diplômes hier, les dirigeants de l’école en ont profité pour rendre hommage à Alioune Fall, ancien PDG de l’ORTS.

Le Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti) a rendu hier un vibrant hommage à Alioune Fall. L’ancien journaliste et président directeur général de l’Office de radio et télévision sénégalais a été choisi comme parrain de la 43ème promotion des sortants du Cesti. Considéré comme l’un des pionniers du journalisme en Afrique, après les indépendances, le monde de la presse a été unanime hier pour dire qu’il fut un modèle dans son domaine. Non connu des jeunes générations, ses anciens collègues et sa famille ont fait sur lui des témoignages très émouvants. Sa fille, la journaliste Dié Maty Fall, n’a pas hésité à lire le testament de son père décédé en mars 1975 à Paris en France, pour rappeler son attachement à sa famille. Selon elle, le journalisme n’était pas une vocation pour Alioune Fall, mais un sacerdoce. Elle explique que si elle est journaliste aujourd’hui, il y a forcément l’influence de son père.
A sa suite, le directeur du Cesti, Ibrahima Sarr, a soutenu que ce choix du parrain n’est pas fortuit. « C’est un choix réfléchi. C’est un exemple à suivre pour la jeune génération », a-t-il dit devant un parterre d’invités et de journalistes. Il a, comme plusieurs intervenants, invité ses nouveaux jeunes confrères au respect strict des règles d’éthique et de déontologie. La présence de hautes personnalités parmi lesquelles les anciens premiers ministres Mamadou Lamine Loum et Souleymane Ndèné Ndiaye, El Hadji Mansour Mbaye, entre autres, témoigne de la reconnaissance de beaucoup de Sénégalais au premier PDG de l’ORTS.
La cérémonie de remise des diplômes cumulée à l’anniversaire des 50 ans du Cesti a été aussi une occasion pour revenir sur le métier de journalisme et le rôle de l’école, depuis sa création. « Le Cesti est l’une des premières écoles de journalisme en Afrique. Elle fait partie aujourd’hui des dix meilleures écoles de journalisme en Afrique. Elle est la première en Afrique francophone, selon une évaluation de l’Unesco », a informé le directeur. Selon lui, les produits de cet institut à vocation panafricaine ont beaucoup contribué aux avancées démocratiques au Sénégal et dans le reste du continent. Il n’a pas aussi manqué de souligner la précarité du marché de l’emploi dans le domaine de la presse, ce qui rend vulnérable le journaliste. Ibrahima Sarr a enfin invité les anciens du Cesti à redynamiser leur amicale, afin de restaurer le débat autour des questions qui intéressent la profession.
Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Mary Teuw Niane, venu présider la cérémonie, a insisté sur l’importance de la formation. Il a réaffirmé l’intérêt qu’il accorde à la presse qui intéresse l’enseignement supérieur. « Nous avons cette année octroyé au Cesti 50 millions de francs CFA qui a permis l’achat d’un matériel moderne pour relever le plateau technique. Un nouveau bâtiment qui va abriter un amphi de 200 places et des bureaux est en construction », a-t-il révélé. Selon, lui, la formation est d’autant plus importante qu’on « note souvent des entorses dans la presse ».
C’est sous le signe d’un « nouveau défi » que les 22 journalistes de la 43ème promotion ont reçu leurs parchemins. Ils sont 7 journalistes avec option radio, 11 en télévision et 4 en presse écrite. Les nouveaux diplômés frappent désormais à la porte de l’emploi si difficile à trouver. Selon Oumar Mamadou Bassoum, qui a parlé au nom de la promotion, lui et ses camarades sont prêts à servir. Il a invité les patrons de presse à accorder une attention particulière aux derniers arrivés du métier. « Si chaque organe de presse recrutait un élément parmi nous, nous aurions tous du travail sans difficulté », a rappelé M. Bassoum. A signaler que notre confrère Mamadou Diallo de EnQuête fait partie des récipiendaires. Nous lui adressons nos chaleureuses félicitations.
                                                                                                                 ABDOURAHIM BARRY 

mercredi 2 décembre 2015

DEBAT SUR L’ACTE III DE LA DECENTRALISATION: La partition de la FKA et du Cesti

L’acte 3 de la décentralisation continue d’alimenter les débats autour de sa pertinence. Les experts et les acteurs soulèvent de
ux principaux problèmes à savoir le manque de communication et de ressources financières.

‘’Acte 3 de la décentralisation : une réforme, des questions’’. C’est le titre de l’édition n°18 de la   revue annuelle ‘’Les Cahiers de l’Alternance ‘’. Lors de la cérémonie de lancement, hier à la Fondation Konrad Adenauer (FKA), les différents acteurs ont souligné la pertinence de cette réforme tout en reconnaissant des difficultés dans l’application. Parmi les principaux problèmes soulevés par les participants figure en première place le manque d’information et de financement des nouvelles communes.
Editée par le Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti) en partenariat avec la FKA, le document  confirme les difficultés précitées. Selon Mamadou Koumé formateur au Cesti et coordonnateur de la revue, en parcourant le document, on se rend compte que la question des ressources se pose à tous les niveaux. ‘’C’est la complainte qui revient tout le temps. Beaucoup de maires disent qu’ils ont des problèmes pour payer leurs employés et ils accusent l’acte 3’’, a-t-il dit. Pour lui, le choix du sujet n’est pas fortuit car il domine les débats depuis l’adoption de la loi. Dans une salle pleine d’élus locaux, experts, journalistes et membres de la société civile, les échanges ont montré qu’il y a beaucoup d’enjeux et d’intérêts autour de cette  réforme.
‘’A entendre certains parler, on a l’impression que l’Acte 3 est fini et qu’on est en train de faire le bilan, alors qu’il vient de commencer. Il n’a pas véritablement démarré. Il faut du temps pour tirer une conclusion‘’, a précisé pour sa part l’expert en décentralisation au ministère de la Gouvernance locale, du Développement et de l’Aménagement du territoire, Oumar Wade. Convaincu de la nécessité de cette ‘’innovation‘’, ce dernier soutient que la territorialisation des politiques publiques permettra aux représentants des pôles régionaux de développement d’exécuter eux-mêmes les programmes définis par les ministères au niveau local.
Concernant la question financière, principale préoccupation des élus locaux, il a donné des garanties. ‘’La commission en charge des finances a déjà terminé ses études pour réformer ce domaine. On va tout faire pour que les communes soient solvables’’, a-t-il promis. Mais ces assurances ne convainquent pas tout le monde. Une intervenante s’est surtout interrogée sur la viabilité de certaines collectivités locales. A en croire l’activiste membre d’une association qui défend le développement à la base, il y a des communes sans activités économiques. ‘’Une collectivité locale qui peine à payer ses employeurs ne peut pas se développer’’, a-t-elle fait remarquer.
Créé depuis 2000 d’où le nom ‘’Les Cahiers de l’Alternance’’, ce document est produit chaque année par les étudiants en 3ème année de presse écrite du Cesti. Pour ce numéro, les membres de la 42ème promotion ont sillonné toutes les régions à l’exception de Louga. ‘’C’était très difficile mais, c’est un travail assez satisfaisant. On y traite les problèmes de financement, les impôts etc.‘’, a dit en substance Ousmane Laye Diop par ailleurs journaliste à EnQuête qui a parlé au nom de ses camarades. ‘’Cette réforme apporte des innovations donc, il est important de mettre en place un système de communication pour informer les citoyens’’, a conclu Mouminy Camara le représentant du directeur du Cesti, Ibrahima Sarr.
                                                                                                              ABDOURAHIM BARRY 

vendredi 13 novembre 2015

PROFESSEUR BABACAR SAMB (ANCIEN AMBASSADEUR DU SENEGAL EN EGYPTE)

‘’La Burqa n’est pas autorisée par l’islam’’
Réagissant au débat sur le port du voile intégral, l’ancien chef du département d’arabe de l’Ucad, qui
Babacar Samb
était hier dans les locaux du Centre d’études des sciences et techniques de l’information
 (Cesti), préconise l’interdiction de la Burqa pour des raisons de sécurité. Mieux, pour Babacar Samb, la Burqa n’est pas autorisée par l’islam
Les réactions au discours du chef de l’Etat Macky Sall sur le voile intégral continuent de fuser de partout. L’ancien Ambassadeur du Sénégal en Egypte, Babacar Samb, est en phase avec le président de la République. Invité hier du Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) dans le cadre de ses carrefours d’actualité, il soutient que le voile intégral peut être interdit pour des raisons de sécurité. ‘’Même l’institut Al Azhar du Caire qui est une référence des musulmans sunnites l’a interdit’’, a-t-il précisé.
Le professeur Samb affirme que ce type d’accoutrement n’est pas autorisé par l’islam. "La Burqa n’a pas une base islamique. C’est un habillement qui relève de la tradition arabe. La femme musulmane doit couvrir  son corps certes, mais pas de façon intégrale. Cette forme de voile est imposée par les conditions climatiques des pays du Golfe avec le vent, la chaleur etc. C’est pourquoi dans cette zone, même les chrétiennes se voilent", a-t-il dit.  D’après Le professeur, l’Etat qui est garant de la sécurité des populations doit tout mettre en œuvre pour sécuriser les personnes et leurs biens et interdire  la Burqa. "Notre pays n’est pas à l’abri du terrorisme même si la menace n’est pas imminente. On a noté depuis quelques années la  naissance de mouvements islamiques au Sénégal. Ils viennent avec leur propre litanie et nous impose un nouveau type d’habillement copié des confréries arabes", a-t-il ajouté. Le spécialiste du monde arabe préconise la prévention comme moyen de lutte contre le terrorisme. Il invite par ailleurs l’Etat à une large concertation sur la question en impliquant tous les acteurs religieux. Selon lui, chacun est libre de s’habiller comme il veut à condition qu’il ne menace pas la sécurité des citoyens.
‘’La troisième intifada’’ 
Babacar Samb est aussi largement revenu sur les crises dans le monde arabe en général et au Moyen Orient en particulier. La particularité des régimes arabes, c’est qu’il n’y a jamais eu d’anciens chefs d’Etat, tous les dirigeants ont régné jusqu’à leur mort ou ont été tués au pouvoir. Abordant le plus vieux conflit de la région, il fustige le comportement d’Israël et la complicité de la communauté internationale. Selon lui, la nouvelle forme de combat au couteau adoptée par les Palestiniens peut être considérée comme ‘’la troisième intifada’’.
‘’Israël est le seul membre de l’organisation des Nations unies (Onu) au monde qui ne respecte pas ses résolutions. Et cela,  sans conséquence. Il est aussi le seul pays qui théorise et pratique le terrorisme d’Etat’’, a-t-il dénoncé devant les étudiants du Cesti. L’ehec de Barack Obama sur le règlement du conflit israélo-palestinien s’explique, selon lui, par un manque d’autorité du président américain sur l’Etat sioniste. ‘’Le lobby juif aux Etats-Unis est tellement fort que tout président américain, qu’il soit républicain ou démocrate, est obligé de s’aligner sur la volonté des juifs’’, croit-il savoir.
Concernant la crise au Yémen dans laquelle le Sénégal a failli s’engager aux côtés de la coalition menée par l’Arabie Saoudite contre la rébellion Houtti, il prédit que personne ne pourra gagner cette guerre. Et les raisons sont simples, d’après lui : ‘’C’est un pays montagneux où il est difficile de combattre’’. L’ancien ambassadeur a aussi soutenu que ce sont les mêmes causes qui ont empêché les Américains et leurs alliés de gagner contre les talibans en Afghanistan. ‘’L’ancien empire Ottoman avait dominé l’ensemble des pays arabes sauf le Yémen.
Et les minorités  houttis et Jaïdites ont toujours été marginalisées par le gouvernement yéménite. Donc ils n’accepteront pas de négocier pour céder le pouvoir à Sana, mais le partager, ce que refusent les Saoudiens et leurs alliés’’, a rappelé Babacar Samb. Concernant la victoire des islamistes dans la plupart des pays qui ont connu le printemps arabe, le professeur Samb a soutenu que c’est à cause de la crise idéologique dans le monde. ‘’Les islamistes ont toujours attiré les électeurs dans ces pays car les gens s’identifient à leur discours. Aujourd’hui, si on organisait des élections libres et transparentes en Egypte, les frères musulmans les gagneraient.’
                                                                                        ABDOURAHIM BARRY ET OUMAR BAYO BA 

lundi 9 novembre 2015

PHILOME ROBERT, JOURNALISTE A FRANCE 24

"Même si, après les avocats et les politiques, nous sommes les plus détestés,… "
De passage à Dakar, Philomé Robert, le présentateur vedette de la chaîne d’information en continue France 24, s’est entretenu hier avec les étudiants du Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti).

Philomé Robert était l’invité de la direction de l’école dans le cadre des carrefours d’actualité organisés presque tous les mercredis soirs. Le présentateur a axé sa communication sur le métier de journaliste et sa Chaîne France24 . Il a expliqué qu’elle est un média de service public mis en place par l’Etat français pour défendre ses intérêts et son image à l’extérieur. « France 24 a une mission de vendre l’image de la France à l’étranger, comme tous les grands pays en ont (CNN, la BBC, Aljazira etc.) ».
Toutefois, il a précisé que les journalistes sont libres. Cette précision est d’autant plus importante que le Groupe France Média monde auquel appartiennent France 24 et RFI est accusé de faire de la propagande pour l’Etat français.  Sous la tutelle du Quai d’Orsay (ministère des Affaires étrangères de la France), ces structures médiatiques ne font pas l’unanimité en Afrique, surtout chez les anti-impérialistes et combattants de la Françafrique.
L’auteur du livre « Exil au crépuscule » n’a pas manqué de se prononcer sur son métier qui lui a valu son exil. Philomé Robert a rappelé aux journalistes en herbe qu’ils sont dans un domaine où on ne doit pas oublier l’essentiel. « Notre première fonction est de servir les citoyens, surveiller les pouvoirs publics et stimuler le débat démocratique », a-t-il dit. Selon lui, le journaliste doit toujours douter de tout et être vigilant. Dans le contexte de l’explosion des médias et le Web qui fait que tout le monde livre des informations, il estime que les journalistes doivent s’adapter aux nouvelles technologies. « Il faut distinguer l’information de la propagande et de la désinformation.
Je ne crois pas à la neutralité et à l’objectivité. Mais, je ne me permets pas d’être malhonnête, de dire des choses qui n’existent pas », a-t-il soutenu. Ainsi, il est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à l’exil. Il raconte dans l’ouvrage précité comment il a échappé à un assassinat, dans son pays, Haïti. Lors, d’élections dans cet Etat des Caraïbes, il y a eu des bourrages d’urnes. Il fallait choisir entre être neutre et renvoyer le pouvoir et l’opposition dos à dos ou dire la vérité. Il a décidé de relater les faits. Cela a failli lui coûter la vie. Ces événements se sont déroulés dans les années 2000, sous le règne de Jean Bertrand Aristide. Depuis, il est devenu  un défenseur de la liberté de la presse. « Même si, après les avocats et les hommes politiques, nous sommes les plus détestés, notre métier reste très utile pour la société », a-t-il conclu. 
                                                                                                            ABDOURAHIM BARRY 


mardi 25 août 2015

Mamadou Dia revit dans le cœur des khombolois

Le premier chef de l’exécutif sénégalais reste populaire dans sa ville natale. Les khombolois lui témoignent une reconnaissance sans faille. Ils regrettent son court passage au pouvoir et réfutent les accusations de coup d’Etat contre lui en, 1962.
« Si Mamadou Dia n’avait pas été arrêté, Khombole serait aujourd’hui  l’une des villes les plus émergentes du Sénégal ». Ces propos de M. Dieng, délégué de quartier, montrent bien l’affection que les khombolois gardent toujours à l’égard de l’ancien président du Conseil et chef de l’exécutif de 1960 à 1962.  Personnalité politique de premier plan à l’indépendance, les habitants de khombole, surtout les vieux qui l’ont connu, regrettent son court passage à la tête du gouvernement. Malgré son mandat abrégé par les événements douloureux du 22 décembre 1962, toutes les infrastructures notamment routières datent de l’époque où il était au pouvoir. «Toutes les routes qui existent dans la commune ont été construites par lui. Elles remontent à 1963. Il nous a tout donné », ajoute M. Dieng.
A quelques centaines de mètres du marché se trouve la maison familiale du défunt président du Conseil. Rien ne montre que l’homme politique vivait ici. Elle ressemble à un lieu abandonné. Elle est constituée de deux bâtiments, l’un habité par des locataires et l’autre fermé. Elle garde son architecture initiale. Au milieu de la cour se trouve un manguier. Les occupants ne connaissent même pas qui était l’homme.
Derrière la cour, se dresse une maison ultra moderne. Elle est issue de la division de la grande maison familiale des Dia. Nièce et belle-fille de Mamadou Dia, Maty Souaré y vit avec sa famille. Elle est l’épouse du feu Ousmane Dia neveu de l’ancien ami et compagnon de Senghor. Dans son salon comprenant des équipements modernes, le voile sur la tête et un chapelet à la main, elle est en train de formuler ses prières en cette soirée du lundi premier mai 2015. Elle ne se rappelle pas les événements de 1962, car « j’étais très jeune », affirme-t-elle. Mais soutient-elle, « connaissant l’homme, il était incapable de faire du mal à quelqu’un. Il était véridique. Je pense que c’étaient des accusations sans fondement. Il n’a jamais fait un coup d’Etat», conclut, Maty.
Les khombolois ont du mal à croire que Mamadou Dia avait des intentions de renverser Senghor. Selon Macoumba Fall, enseignant et conseiller municipal, la crise de 1962 avait des soubassements politiques car il y avait une dualité au sommet de l’Etat.
Six ans après sa disparition, Mamadou Dia est perçu comme une personne  gentille et généreuse par ceux qui l’ont connu, au moins ici à Khombole. « Il est issu d’une bonne famille. Quand mon  père est venu ici, il habitait chez lui», raconte le vieux Moustapha Bâ, un voisin. « A l’époque nous étions en paix. Mais Khombole a beaucoup souffert des rivalités de Dia et Senghor», poursuit-il. Âgé de 89 ans, Bâ est un témoin de cette période. Avec sa voix à peine audible, il n’en veut pas à Senghor car selon lui, c’est Satan et la politique qui ont détruit cette amitié sincère qui existait entre les deux hommes d’Etat. «Senghor venait rendre visite à la famille sans Mamadou Dia», soutient Maty Souaré.
Si Khombole est dans cette situation de pauvreté c’est parce qu’elle « a été victime du dualisme entre Mamadou et Léopold», ajoute M. Dieng. Les routes datent de 1963. Depuis lors, il n’y a eu aucune nouvelle infrastructure et celles qui sont là n’ont jamais été réfectionnées. Malgré la courte durée de son pouvoir, les Khombolois estiment qu’il a réalisé plus que tous les gouvernements qui lui ont succédé.
                                                                                              Abdourahim BARRY
                                                                                                                       

            

lundi 3 août 2015

MODOU MBAYE DIOR: La force tranquille d’un patriarche

Plus de cent ans de vie. Il continue pourtant de se lever le matin et d’aller au travail. C’est un exemple de courage et de réussite pour la jeune génération qui peine à trouver un emploi.
   
«Le premier Toubab qui est venu s’installer  à Khombole  s’appelle Guimard». Ces propos témoignent de son ancienneté.  Quand on lui demande de raconter l’histoire de sa ville, Modou Mbaye Dior est très à l’aise pour le faire car c’est un témoin au moins des cent dernières années. Malgré ses 107 ans, il dit à qui veut l’entendre « nakha gouma » (je n’ai pas perdu mes facultés mentales). Il reconstitue les histoires avec précision en convoquant souvent les dates des événements.
En bon mouride, le travail est plus qu’un sacerdoce pour lui. Ce vieux à la longévité exceptionnelle, dans une société sénégalaise où l’espérance de vie est estimée à 50 ans, n’a jamais pensé à la retraite. Pour le rencontrer pendant la journée, il faut venir le trouver sur son lieu de travail. Il a exercé presque tous les métiers possibles, à Khombole. « Quand je suis arrivé ici en 1925, j’étais cultivateur. Ensuite je vendais de l’or et des tissus. J’ai été aussi boucher.  Je vends du bois de chauffe depuis 1970. J’ai  commencé avec cinq cent francs CFA», narre-t-il apparemment satisfait.
 Néanmoins, le natif de Thilla Ounté, village situé à 5 km de khombole perd de plus en plus son combat contre l’âge. Il est difficile aujourd’hui de saisir tout le sens de ses paroles car, parfois, on a du mal à comprendre ce qu’il dit. Son interlocuteur est obligé de crier pour se faire entendre puisque ses oreilles aussi sont en train de le lâcher. Ne lui souhaitez surtout pas longue vie. Il rétorque immédiatement, « moi j’ai déjà une longue vie car je suis né en 1908 et je suis là en train de vous parler».
Polygame, Modou Mbaye Dior avait quatre épouses. Les deux sont décédées, il ne lui reste que la première et la quatrième. «Je suis la seule en vie avec  la première. Cette dernière est très veille. Elle est à la maison», explique Mame Astou Mbaye la quatrième qui tient, elle aussi une table et vend divers objets à côté de son époux. Elle ne peut pas dire avec exactitude le nombre de leurs enfants. « Tout ce que je sais, c’est que nous en sommes à notre soixante-troisième année de mariage. Nous avons eu dix-sept enfants. Quatre sont décédés, il reste treize».
A la différence, de beaucoup de vieillards moins âgés que lui, Modou Mbaye Dior, ne s’appuie pas sur une canne pour marcher. Quand il parle, il ne regarde jamais son interlocuteur dans les yeux. Cela est peut être lié à son âge. Ses petits yeux se sont beaucoup rétrécis. Il les fixe sur une seule direction et on a du mal à voir à l’intérieur. Pourtant il voit normalement et identifie les personnes qu’il connait sans difficulté. Sur son lieu de travail situé  au bord de la route qui mène à Touba, il est assis sur une natte sous un arbre. Son chapelet à la main il passe toute la journée à demander pardon à son Seigneur.
En formulant des prières, les paroles du disciple mouride sont presque dominées par les « thi barke Serigne Touba ». Quoi de plus normal pour un fervent « talibé » (disciple) qui a vécu à l’époque du fondateur du mouridisme et a assisté à une de ses visites à Khombole. Pendant une discussion, ne lui coupez pas la parole pour poser une question ou demander un éclaircissement. Il menace alors de mettre fin à l’entretien. Entouré de quelques-uns de ses petits-fils, il s’entend mieux avec eux. Des regrets dans sa riche et belle carrière? Il n’en a pas, même s’il reconnait qu’«on ne peut pas vivre jusqu’à un certain âge sans jamais faire des choses regrettables ».
                                                                             Abdourahim BARRY       
         


mardi 7 juillet 2015

La déperdition scolaire à Khombole

Des élèves entraînent de chanter dans une classe 
  « L’éducation se porte mal ». Khombole a longtemps été considéré comme un creuset intellectuel à cause de son histoire. Mais aujourd’hui, l’héritage colonial n’est visible que par les vieux bâtiments laissés par les colons et le chemin de fer qui rappelle le passé glorieux du commerce.
Cette ville très bien dotée en infrastructure scolaire est touchée de plein fouet par le phénomène de la déperdition scolaire qui touche la plupart des zones rurales. Les taux de réussite aux examens sont très faibles à tous les niveaux. «L’éducation se porte très mal dans la commune de Khombole et environ, le niveau des élèves est très faible », explique Macoumba Fall, enseignant et président de la commission éducation à la mairie de Khombole. Les causes de ce problème sont nombreuses et variées. Entre une mauvaise politique éducative de l’Etat et un bas niveau de certains enseignants, les responsabilités sont partagées.
La politique de massification que l’Etat a adoptée est décriée par les enseignants et les parents d’élèves. M. Fall juge inacceptable les directives données aux enseignants. « On nous intime l’ordre de ne pas faire redoubler un enfant en classe de CI, même s’il ne sait pas lire ». Cette politique qui vise à satisfaire les bailleurs de fonds à travers des chiffres parfois exagérés, a fini de rabaisser drastiquement le niveau des élèves à tout point de vue. Le recrutement des acteurs de l’éducation aussi est pointé du doigt. L’enseignement n’est plus un métier par option, mais un point de chute pour certains cartouchards des universités et personnes qui n’ont pas pu réaliser leur rêve d’entame.
Un instituteur qui n’a pas de niveau ne peut pas inculquer du savoir à un élève. Certains peinent à construire une phrase correcte, « ils passent tout leur temps à parler Wolof dans les classes, parfois même ils expliquent les leçons dans cette langue ». Ce constat est de presque tous les parents d’élèves rencontrés dans la ville de Mamadou Dia. Dès lors, un problème majeur se pose car comme le dit l’adage « on ne peut transmettre que, ce que l’on a ». Homme du sérail, Macoumba Fall enseigne depuis 1978. Celui qui a étudié pendant le règne de Senghor, époque où le Sénégal était une référence en Afrique et dans le monde, dresse un bilan sombre de la situation scolaire et accuse sans peine ses collègues. «L’absentéisme, les récréations prolongées et la féminisation de la profession sont entre autres les principales causes du faible niveau». Tous ces problèmes réunis, ils conduisent inévitablement les apprenants vers des échecs et vers l’abandon.
L’Ecole élémentaire Ismaël Diop a été créée en 1915. Elle a débuté avec deux classes. La première école de la commune et de toute la zone compte aujourd’hui 15 classes.  C’est avec fierté que Monsieur Sadikh Gueye, le directeur cite les personnalités qui ont eu à faire leur scolarité dans son établissement, entre autres  Mamadou Dia, Nalla Ndiaye et lui-même. Les cas d’abandon sont très élevés. «Les causes sont souvent le manque de moyens des parents d’élèves et manque d’encadrement à la maison». Le taux de scolarisation tourne autour de 70% dans la commune de Khombole avec une majorité de filles. Mais à l’arrivée, beaucoup d’élèves n’achèvent pas le cycle primaire «nous avons déjà 4 filles qui ne feront pas l’examen faute d’extraits de naissance», se désole M. Gueye.
La majorité des parents n’ont pas été à l’école. Cela entraîne un problème d’encadrement à la maison. Ainsi, les enfants sont laissés à eux même. Ils passent toute la journée à errer dans les rues et jouer au football après les cours. Ils repartent le lendemain sans jeter un seul coup d’œil sur les leçons précédentes.
Commune depuis 1925, Khombole est un symbole de la domination coloniale. Naturellement comme toute ancienne ville avant les indépendances, l’école a été très tôt installée. La commune est bien servie en infrastructures   éducatives. Elle compte 6 écoles primaires, un lycée, un collège et une école privée catholique. Malgré ce privilège, les échecs scolaires se multiplient entraînants une régression de l’enseignement du français dans la zone.
                                                                                                    Abdourahim Barry

  

    


jeudi 25 juin 2015

Transition de l’analogique au numérique : Les étudiants méconnaissent la télévision numérique terrestre

La date butoir du passage de l’analogique au numérique a expiré aujourd’hui.
Dans les ménages rien n’a changé. La télé est toujours analogique. Les étudiants fustigent le manque d’information qui entoure le projet.
     Le moment tant attendu est venu, au moins théoriquement.  Les téléspectateurs sont officiellement entrés dans le monde numérique. Ce changement plus que révolutionnaire est pourtant ignoré par la majorité de la population. A l’université Cheikh Anta Diop de Dakar on déplore un défaut de communication. Les étudiants ne sont pas bien informés sur le sujet. Certains le confondent au tournoi de lutte dénommé « TNT ». Le manque d’information est pointé du doigt par toutes les personnes interpellées.
    Le campus social est un endroit différent des autres. Certaines considèrent que c’est une ville à part entière. Plus de quatre-vingt mille âmes y vivent ou au moins fréquentent les lieux. Au pavillon A, le plus grand et le plus vieux du campus est un exemple patent de son surpeuplement. Les chambres construites initialement pour deux personnes, abritent parfois plus de dix.
    Après les heures de cours les étudiants s’adonnent à des activités de divertissement. Midi c’est l’heure de la pause pour la plupart d’entre eux. Chambre  163 couloir H  du pavillon A, il est difficile de trouver une place pour s’asseoir. Entre les locataires des lieux et les visiteurs, elle est pleine à craquer.  Un téléviseur éteint est posé sur la table. Un ordinateur portable sur lequel une partie du groupe regarde un film a pris le relais de la télé. La musique elle vient en appui pour rendre l’ambiance plus agréable. Ici dès qu’on prononce  le mot «  TNT », on vous renvoie au tournoi de lutte qui porte le même nom. Aïssatou Faye venu rendre visite à ses camarades d’amphi, affirme ne pas savoir beaucoup de chose sur cette affaire. Tout ce qu’elle sait « c’est que c’est une télévision plus sophistiquée et on dit qu’on doit changer nos postes téléviseurs ». C’est tout ce que peut dire sur le sujet l’étudiante en licence 3, au département d’anglais. Sur cette ligne, elle n’est pas seule. Son camarade d’amphi Nazir Niang est au même niveau d’information. « C’est une télévision qui te permet de te connecter à Internet avec ton poste téléviseur», affirme-t-il.   
    Beaucoup ne savent même pas de quoi il s’agit. Toutes les personnes interrogées sont unanimes pour dire que l’information n’est pas bien passée. Dans ce même pavillon, chambre 314. Un calme presque total y règne. Contrairement à la chambre précédente, Daouda Saïdou Ly et ses camarades n’ont pas de téléviseur. Daouda est convaincu que le basculement effectif de l’analogique vers le numérique ne sera pas pour demain. « Les populations ne sont pas bien informées alors qu’elles sont les premières concernées». L’économiste en formation à la faculté des sciences et de gestion (Faseg) et par ailleurs natif du Fouta, ajouté « moi je suis villageois et on dit que la TNT va permettre surtout aux populations rurales d’accéder à toutes les chaînes de télévision, mais ils ne sont même pas au courant de l’existence de ce projet».
    Restons au vieux pavillon. La chambre 320, l’ambiance est assez particulière. Malgré l’étroitesse de la pièce, une grosse télévision accompagnée d’un ordinateur fixe est posée sur la table. Une imprimante déposée par terre et beaucoup de papiers mal rangés sur les étagères. Ici, il faut aussi tenir compte des nombreux cafards visibles partout. Ils se faufilent entre les personnes. Mieux informé, Yagouba Sagna lui maitrise l’essentiel des informations véhiculées par les médias. L’étudiant   en licence 3 en science politique est au diapason de l’actualité. Il est même prêt pour l’achat du décodeur condition sine qua non pour capter le signal numérique.   Mais il partage l’idée de  ceux qui disent qu’il n’y a pas une bonne communication autour de ce changement.  Sa préoccupation majeure « les chefs d’entreprise doivent changer de contenu Il n’y a que du divertissement », conclut Sagna.
    Les pensionnaires du pavillon B, plus calmes que ceux de A, confirment la tendance qui s’est dégagée au sein de la population en général et au sein des étudiants en particulier. Dans cette chambre individuelle occupée par 6 personnes tous les regards sont fixés sur le petit écran. A cette heure de pose, ils regardent le journal sur Walf TV. Autour de la théière s’active, Djibril Sène étudiant en master 2 de géographie. Il  nous montre avec humour le fil de fer qui sert d’antenne pour capter le signal. La TNT, il  n’en sait pas grand-chose. Il a entendu seulement qu’on doit acheter des décodeurs pour avoir les images de la télévision. « Ce sera des dépenses supplémentaires et on n’a pas d’argent », conclut-il.
    La télévision numérique terrestre n’est pas encore une réalité au Sénégal malgré la date butoir qui était fixée pour aujourd’hui. En attendant l’effectivité du projet, les sénégalais concernés au premier chef, continuent de recevoir les images analogiques. Pour une bonne transition de l’analogique au numérique, les autorités en charge de la question doivent tenir compte de ces remarques et relever le défi de la communication.
                                                                                                      Abdourahim Barry


jeudi 18 juin 2015

L’Ucad envahie par les déchets plastiques


L’université Cheikh Anta Diop de Dakar montre un visage de plus en plus dégradé. Son environnement ne correspond plus à une université moderne.
L’insalubrité a atteint un niveau inquiétant. Entre l’incivisme de ses occupants et le sureffectif, toutes les conditions sont réunies pour polluer l’espace universitaire.
    L’image de la première université francophone d’Afrique  ne sied pas à son statut.  Derrière les grandes artères bien ornées par quelques fleurs, se cache une autre réalité. L’environnement est très mal en point. La pollution a atteint son paroxysme. Les sachets plastiques, les tasses de café Touba et les papiers de toute sorte envahissent les facultés et les espaces publics. Malgré la verdure, le campus pédagogique donne une mauvaise image au visiteur.
    L’Université Cheikh Anta Diop ne remplit pas les critères standards d’une université sur le plan environnemental. Ce constat est partagé par les autorités universitaires. « Le campus est dans un état insalubre, ce qui est inacceptable », dénonce le Professeur Falilou Ndiaye, coordonnateur du programme d’amélioration du cadre de vie mis en place  par le recteur. C’est ce qui a motivé la journée de « set setal » et de sensibilisation organisée le samedi dernier par le rectorat.
    Situé derrière la faculté de médecine, le bois sacré est très connu des étudiants en quête d’endroit calme pour réviser leurs leçons. Ici, on a l’impression d’être au milieu d’une forêt équatoriale. Le bruit des oiseaux perturbe un peu le calme qui y règne.  Difficile d’avoir une place pour s’asseoir.  Des étudiants s’installent sous les arbres. Les yeux rivés sur leurs cours, ils s’asseyent sur des briques, des pierres superposées, des nattes ou tapis de prière etc. Ils passent toute la journée dans ce lieu qui garantit l’oxygène à ses hôtes. En face de ce paysage admirable se trouve un dépotoir d’ordure. Tous les déchets collectés à la faculté de médecine sont déposés ici pour être ensuite incinérés. Assise à quelques mètres, Yacine Bâ étudiante à la faculté des sciences juridiques et politiques déplore cette situation. « Notre environnement doit être entretenu, mais vous constatez vous-même que les ordures sont partout et une mauvaise odeur se dégage du dépotoir ».
    L’Ucad ne dispose pas de système de collecte et de gestion des ordures ménagères. « Entre les étudiants, les enseignants et le personnel de service, cent mille personnes vivent dans cet espace de quelques hectares», renseigne le Professeur, Falilou Ndiaye. Ce nombre composé en majorité d’étudiants qui foulent souvent aux pieds les règles civiques justifie bien l’état d’insalubrité dans lequel se trouve le temple du savoir. Le quotidien de ces « inconscients environnementaux » est rythmé par la consommation du café Touba et de l’eau en sachet. Les déchets plastiques sont les plus nocifs pour l’environnement. «Ils ne sont pas biodégradables, ils peuvent rester pendant cent ans sans se dégrader», explique Mamadou Kébé, étudiant en licence 2 au département de science naturelle de la faculté des sciences et techniques.
    Autre endroit, mêmes réalités. La faculté des sciences juridiques et politiques, la seule à être entièrement clôturée. On ne peut pas entrer ou sortir par la petite porte qui mène à la faculté des sciences sans être attiré par le dépôt d’ordures. Comme à la faculté de médecine, c’est ici qu’on dépose et incinère tous les déchets produits par les juristes de l’Ucad. A l’intérieur, l’imposant bâtiment de couleur marron abritant les deux grands amphis, domine l’espace. Monsieur Dia, gérant de buvette, est entouré d’étudiants. Les tasses de café Touba et les sachets d’eau sont inconsciemment jetés par terre.
    Le bruit qui règne dans le hall est comparable à celui d’un marché très fréquenté. Des tasses de café Touba par ci, des sachets d’eau vides par-là, les emballages de biscuit, c’est le triste décor de ces lieux pourtant nettoyés chaque jour. De taille courte et de grosse corpulence, tenant un balai, Ndeye Diouf fait partie de l’équipe chargée de nettoyer la faculté. Elle regrette le comportement des étudiants « Nous balayons chaque jour tous les coins et recoins. Mais avant de terminer, ils commencent à salir. Il y a des poubelles, mais jamais ils ne jettent les ordures dedans ».
Le nouveau recteur et son équipe ont décidé de mettre fin à ce problème qui déshonore l’Ucad. Selon M. Falilou Ndiaye, « le recteur a prévu un budget de 250 millions de francs CFA et 1 milliard à long terme. Nous avons un programme de réhabilitation de toutes les routes et le  pavage du campus ». Le rectorat va signer bientôt une convention avec les mairies de Fann et de Point E pour qu’elles prennent en charge le ramassage des ordures dans le campus.
En attendant l’effectivité de ces projets, l’université Cheikh Anta Diop continue de donner deux images contradictoires. Celle d’un environnement bien entretenu avec un espace très boisé et celle peu enviable d’une nature agressée et envahie par les déchets plastiques.   
                                                                                                  Abdourahim Barry

mercredi 10 juin 2015

Logement à l’UCAD: Quand la promiscuité devient la règle


     Se loger à Dakar est un parcours du combattant. L’université  Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) ne  déroge pas à cette règle. Les
Le Pavillon A du campus socilal
conditions de vie dans le campus social ne cessent de se dégrader. L’insuffisance des locaux a créé une promiscuité insoutenable.
              Reportage   
    En passant par l’Avenue Cheikh Anta  Diop,  l’endroit attire forcement votre attention. Le vieux bâtiment  aux couleurs bleue et blanche est un symbole de l’hébergement à l’UCAD depuis sa création. Le pavillon A, le premier à être construit sur le site résume toutes les difficultés de logement pour les étudiants. Entre l’insalubrité des toilettes et le surcharge des chambres, le décor illustre bien les conditions de vie au campus.
     L’UCAD est une ville à part entière pour beaucoup de citoyens. De très loin, elle ressemble à une caserne militaire ou un camp de réfugiés. Des habits de toute sorte sont accrochés sur les fenêtres  des pavillons. Une fois dans le campus social, ce qui frappe le visiteur, c’est le nombre pléthorique d’étudiants dans les rues et dans les couloirs des pavillons.
    Le nombre d’étudiants à loger dépasse très largement le nombre de places disponibles. Officiellement, les chambres sont attribuées par ordre de mérite basé sur les résultats des examens. Elles doivent être occupées au maximum par deux locataires.  Mais  aujourd’hui, la réalité est toute autre car on peut trouver douze personnes ou plus dans une chambre.
    Les étudiants adoptent un système d’hébergement c'est-à-dire si deux obtiennent une chambre, ils discutent et chacun emmène des amis qui n’ont pas de logement. Malgré ça, on n’arrive pas à loger tout le monde. D’autres se couchent dans les couloirs des pavillons.
    Il est 13 heures au pavillon A.  C’est la pause pour la plupart des étudiants. Les couloirs sont remplis du monde. L’ambiance est comparable à celle d’un marché très fréquenté. La pollution sonore est assurée par les conversations, associées à la musique jouée à fond dans presque toutes les chambres.  Les va-et-vient très denses créent des embouteillages humains par endroit.
    Les chambres sont aussi des lieux où se déroulent des activités économiques. Dans la chambre 120 A, on a du mal à trouver une place pour s’assoir. Une photocopieuse et une imprimante sont posées sur la table.  Entre ceux qui viennent rendre visite aux locataires et ceux qui sont venus imprimer ou photocopier des documents, la chambre est pleine à craquer.
    Malgré la chaleur accablante et le manque d’espace dans cette chambre de quelques mètres carré, Modou Mbaye s’active autour de sa théière posée sur un réchaud chinois  qui contribue au chauffage de la chambre. Il explique que lui-même a été hébergé par son ami et ancien camarade de classe au lycée. N’ayant pu remplir les conditions nécessaires pour codifier (bénéficier des logements du Coud). «  Je suis de Thiès et je n’ai pas de parents à Dakar. Donc,  je suis obligé de venir ici, même s’il faut reconnaitre que 12 personnes dans une chambre pose problème », soutient M. Mbaye.
    Dans tous les pavillons, la situation est la même. 23 heures au pavillon E. C’est l’heure du coucher. Le couloir est rempli de matelas et de moustiquaires. Parfois pour passer, on est obligé d’escalader les gens. Devant la chambre 48, Mamadiang Baldé est debout sur une chaise. Il est en train d’éteindre les lampes néons fixées sur le plafond avant de se coucher, pour ne pas trop s’exposer aux passants.
    De taille moyenne et de teint noir, Baldé est étudiant en licence 3 à l’université du Sahel. Le natif de Kolda est dans le privé, mais il vient passer la nuit à l’UCAD. « Mon tuteur est à Tiwaoune Peulh. A peu près, à une vingtaine de kilomètres d’ici. Imaginez si je devais quitter là-bas pour venir étudier chaque jour, c’est impossible », affrime le juriste en formation. Avec ses amis de la chambre 48, il a trouvé qu’il n’y avait plus de place, mais il garde ses bagages dans la chambre et il passe la nuit dans le couloir comme le font des centaines d’étudiants dans le campus social.
    Du côté des autorités du centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud), on explique que des solutions sont en cours. Mais ils reconnaissent qu’on ne peut pas loger tous les étudiants estimés à 80 mille. Trois  pavillons sont en construction pour remplacer les quatre détruits l’année dernière. Un agent du Coud estime qu’un problème d’espace commence à se poser car « pour les pavillons en construction, on était obligé de diminuer le terrain de football pour avoir de l’espace ». Il confie qu’ils comptent reconstruire les pavillons détruits.
    Certains étudiants aussi accusent les agents du Coud de distribuer peu de chambres aux ayants droit et de vendre le reste. Selon Ababacar Sadikh Top, étudiant en licence 2 au Cesti et délégué de l’amicale de son établissement, un de ses amis a une chambre individuelle que son père lui a payée à 200 mille francs CFA l’année. Cela constitue pour lui une preuve irréfutable que la gestion des logements n’est pas transparente.
    Cependant, ces accusations sont difficiles à vérifier même si beaucoup d’étudiants disent la même chose. Quoi qu’il en soit, on peut dire que le campus social de l’UCAD est en train de devenir un bidonville.
                                                                         Abdourahim Barry