L’université Cheikh Anta Diop de
Dakar montre un visage de plus en plus dégradé. Son environnement ne correspond
plus à une université moderne.
L’insalubrité a atteint un niveau inquiétant.
Entre l’incivisme de ses occupants et le sureffectif, toutes les conditions
sont réunies pour polluer l’espace universitaire.
L’image de la première université
francophone d’Afrique ne sied pas à son
statut. Derrière les grandes artères
bien ornées par quelques fleurs, se cache une autre réalité. L’environnement
est très mal en point. La pollution a atteint son paroxysme. Les sachets plastiques,
les tasses de café Touba et les papiers de toute sorte envahissent les facultés
et les espaces publics. Malgré la verdure, le campus pédagogique donne une
mauvaise image au visiteur.
L’Université Cheikh Anta Diop ne remplit
pas les critères standards d’une université sur le plan environnemental. Ce
constat est partagé par les autorités universitaires. « Le campus est dans
un état insalubre, ce qui est inacceptable », dénonce le Professeur Falilou
Ndiaye, coordonnateur du programme d’amélioration du cadre de vie mis en
place par le recteur. C’est ce qui a
motivé la journée de « set setal » et de sensibilisation organisée le
samedi dernier par le rectorat.
Situé derrière la faculté de médecine, le
bois sacré est très connu des étudiants en quête d’endroit calme pour réviser
leurs leçons. Ici, on a l’impression d’être au milieu d’une forêt équatoriale.
Le bruit des oiseaux perturbe un peu le calme qui y règne. Difficile d’avoir une place pour s’asseoir. Des étudiants s’installent sous les arbres. Les
yeux rivés sur leurs cours, ils s’asseyent sur des briques, des pierres
superposées, des nattes ou tapis de prière etc. Ils passent toute la journée
dans ce lieu qui garantit l’oxygène à ses hôtes. En face de ce paysage
admirable se trouve un dépotoir d’ordure. Tous les déchets collectés à la
faculté de médecine sont déposés ici pour être ensuite incinérés. Assise à
quelques mètres, Yacine Bâ étudiante à la faculté des sciences juridiques et
politiques déplore cette situation. « Notre environnement doit être
entretenu, mais vous constatez vous-même que les ordures sont partout et une
mauvaise odeur se dégage du dépotoir ».
L’Ucad ne dispose pas de système de
collecte et de gestion des ordures ménagères. « Entre les étudiants, les
enseignants et le personnel de service, cent mille personnes vivent dans cet
espace de quelques hectares», renseigne le Professeur, Falilou Ndiaye. Ce
nombre composé en majorité d’étudiants qui foulent souvent aux pieds les règles
civiques justifie bien l’état d’insalubrité dans lequel se trouve le temple du
savoir. Le quotidien de ces « inconscients environnementaux » est
rythmé par la consommation du café Touba et de l’eau en sachet. Les déchets plastiques
sont les plus nocifs pour l’environnement. «Ils ne sont pas biodégradables, ils
peuvent rester pendant cent ans sans se dégrader», explique Mamadou Kébé,
étudiant en licence 2 au département de science naturelle de la faculté des
sciences et techniques.
Autre endroit, mêmes réalités. La faculté
des sciences juridiques et politiques, la seule à être entièrement clôturée. On
ne peut pas entrer ou sortir par la petite porte qui mène à la faculté des
sciences sans être attiré par le dépôt d’ordures. Comme à la faculté de médecine,
c’est ici qu’on dépose et incinère tous les déchets produits par les juristes
de l’Ucad. A l’intérieur, l’imposant bâtiment de couleur marron abritant les
deux grands amphis, domine l’espace. Monsieur Dia, gérant de buvette, est
entouré d’étudiants. Les tasses de café Touba et les sachets d’eau sont
inconsciemment jetés par terre.
Le bruit qui règne dans le hall est
comparable à celui d’un marché très fréquenté. Des tasses de café Touba par ci,
des sachets d’eau vides par-là, les emballages de biscuit, c’est le triste
décor de ces lieux pourtant nettoyés chaque jour. De taille courte et de grosse
corpulence, tenant un balai, Ndeye Diouf fait partie de l’équipe chargée de
nettoyer la faculté. Elle regrette le comportement des étudiants « Nous balayons
chaque jour tous les coins et recoins. Mais avant de terminer, ils commencent à
salir. Il y a des poubelles, mais jamais ils ne jettent les ordures
dedans ».
Le
nouveau recteur et son équipe ont décidé de mettre fin à ce problème qui
déshonore l’Ucad. Selon M. Falilou Ndiaye, « le recteur a prévu un budget
de 250 millions de francs CFA et 1 milliard à long terme. Nous avons un programme
de réhabilitation de toutes les routes et le
pavage du campus ». Le rectorat va signer bientôt une convention avec
les mairies de Fann et de Point E pour qu’elles prennent en charge le ramassage
des ordures dans le campus.
En
attendant l’effectivité de ces projets, l’université Cheikh Anta Diop continue
de donner deux images contradictoires. Celle d’un environnement bien entretenu
avec un espace très boisé et celle peu enviable d’une nature agressée et envahie
par les déchets plastiques.
Abdourahim Barry
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