mercredi 23 décembre 2015

PAPE DIOUF SUR L’AFFAIRE LAMINE DIACK: ‘’Le Monde nous apprend des choses que Lamine Diack a de toute façon dites’’


De passage à Dakar, l’ancien président de l’Olympique de Marseille Pape Diouf en a profité pour se prononcer sur l’actualité sportive. Il estime que l’affaire Lamine Diack est très troublante et triste pour une personne que tout le monde adulait.
 L’ancien président de l’Olympique de Marseille, Pape Diouf, estime que les révélations du Journal Le Monde sont troublantes. Invité hier à s’entretenir avec les étudiants du Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (Cesti), dans le cadre des ‘’carrefours d’actualité’’, il estime que les propos attribués à Lamine Diack viennent vraisemblablement de lui.
‘’Effectivement, Le Monde nous apprend des choses que Lamine Diack a de toute façon dites. Il faut savoir quand un journal fait référence à des procès-verbaux (PV), c’est comme une interview enregistrée. Ce sont des propos que la personne a tenus et signés ‘’, a-t-il précisé. Selon lui, cette deuxième affaire a été troublante pour tous ceux qui ont de l’amitié et de l’admiration pour l’ancien président de l’IAAf. Pape Diouf déclare : ‘’Pour ma part, j’avoue que je ne suis pas dans les conditions requises pour avoir toutes les informations. Mais à la lueur des éléments fournis par Le Monde, oui il y a de la matière à se poser des questions sur la culpabilité de Lamine Diack. Jusqu’ici, j’étais, comme la majorité des gens, très prudent sur la ligne de conduite à adopter, mais aujourd’hui je suis un peu plus inquiet pour lui.’’
L’affaire Lamine Diack semble avoir ému tout le monde. Et aux yeux de l’ancien président de l’OM, c’est un coup de tonnerre qui s’est abattu sur tous les amis et admirateurs de l’ancien maire de Dakar. Interpellé sur l’attitude que la presse sénégalaise a adoptée et que certains jugent trop favorable, il répond : ‘’Moi-même quand j’ai eu l’information en France, d’abord la tristesse m’a gagné puis l’étonnement. Voilà un homme que nous tous adulions par rapport à son parcours, à tout ce qu’il a eu à représenter. Subitement il est sous le feu des projecteurs judiciaires de manière où l’infamie n’est pas très loin. Evidemment pour nous tous, le coup était difficile à encaisser. Il fallait comprendre avant de traiter ce qu’on peut appeler une information mastoc.’’
Dans une salle pleine à craquer, le  Marseillais a été soumis à toutes les questions possibles. Parallèlement au traitement des médias sénégalais, il s’est prononcé sur celui de la presse française pointée du doigt par certains compatriotes de l’accusé. Sur cette question, M. Diouf s’est voulu clair : ‘’Dire que la presse française a voulu faire du tort ou éclabousser le pouvoir au Sénégal, je pense que c’est une position exagérée. Je connais beaucoup de journalistes du Monde avec qui je collabore souvent comme les deux auteurs de l’article. Ils se sont spécialisés en matière de faits divers. Ils mènent généralement des enquêtes assez rigoureuses. Quand on parle de Lamine, n’oubliez pas qu’en France, la presse n’a jamais épargné la classe politique. Tout dernièrement, un ancien président de la République a fait l’objet de mise en examen en l’occurrence Nicolas Sarkozy’’, a-t-il expliqué aux journalistes en herbe. Poursuivant son argumentaire, Pape Diouf soutient qu’on ne peut pas quand même dire qu’il y a une sorte de sélection à la tête du client de la part des médias français.
‘’Je crois qu’à aucun moment la presse française n’a voulu salir le pouvoir au Sénégal parce qu’il n’y avait pas de raisons de le faire. Même si la presse française par ailleurs s’est montrée conciliante, parfois un peu trop conciliante comme lorsqu’il fallait commenter les démêlés de Platini à la Fifa et  à la justice. Il y a une sorte d’attentisme général qui veut aujourd’hui que Platini comme Zidane soient des personnes nécessairement à protéger’’, a expliqué l’hôte du Cesti.
Le monde du sport éclaboussé par des scandales à répétiton, les étudiants en ont profité pour poser le débat concernant la transparence dans  ce domaine fermé. Selon l’ancien agent de joueurs, il y a un manque de transparence dans le milieu du sport. Explications : ‘’La Fifa et les grandes instances du sport pensent qu’ils sont au-dessus de tout contrôle judiciaire jusqu’à ce qu’éclatent les scandales. Je pense que maintenant ces affaires de la Fifa et l’IAAF seront des leçons pour ceux qui viendront.’’
Journaliste et enseignant en journalisme en France, Pape Diouf est aussi revenu sur ce métier assez particulier. Il a exprimé son regard sur la presse sénégalaise et la pratique du journalisme dans notre pays. ‘’Le journalisme au Sénégal, je pense que c’est un métier très compliqué. Il y a certes de bons journaux et de bons journalistes, très bien formés. Après il y a effectivement un contexte qui ne favorise pas l’éclosion et ne permet pas aux journalistes de livrer véritablement leurs talents’’, a-t-il dit. Avant d’ajouter : ‘’Lorsque j’étais journaliste à ‘’La Marseillaise’’ ensuite au quotidien ‘’Le Sport’’ et que je devais suivre l’équipe de France à l’extérieur, c’est mon journal qui payait mon billet d’avion, de taxi et d’hôtel. La Rédaction prenait en charge  toutes les dépenses pour que je puisse effectuer mon travail. J’avais donc la liberté totale et absolue d’écrire ce que je pense.
Lorsqu’en Afrique pas seulement au Sénégal, le journaliste dans son désir de faire son métier doit se rendre à l’étranger et que son journal n’a pas les moyens. Et qu’il doit être transporté par un ministère qui lui paye son billet et son hôtel, il est déjà moins libre que moi je l’étais. C’est déjà compliqué pour les journalistes. Ce manque économique empêche les gens d’aller jusqu’au bout de ce qu’ils veulent faire. Il faut du courage pour faire du journalisme ici. Il faut essayer de sortir de ce double piège des forces occultes et des pouvoirs politiques. N’oublions pas que quand un ministre vous transporte et vous nourrit, il n’attend pas à ce que vous écrivez un papier qui le flingue. On a aussi tendance à subir l’influence des personnes qui peuvent faire des choses pour nous. Et là je peux comprendre que quand on est dans certains journaux et qu’on reste pendant des mois sans être payé, on risque d’être très vulnérable et céder à la première tentation’’, a expliqué Pape Diouf à ses futurs confrères.
 En présence du directeur du Cesti Ibrahima Sarr et de Mamadou Koumé formateur à la même école, il pense aussi qu’il y a un travail à faire sur les maquettes qui peuvent aider à avoir un bon journal plus clair et plus lisible. ‘’Le véritable métier que j’ai pratiqué jusqu’ici, c’est le journalisme. Je suis journaliste et je le reste ‘’, a conclu l’ancien président de l’OM sous les applaudissements des étudiants du Cesti.
                                                                                                             ABDOURAHIM BARRY

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