mardi 7 juillet 2015

La déperdition scolaire à Khombole

Des élèves entraînent de chanter dans une classe 
  « L’éducation se porte mal ». Khombole a longtemps été considéré comme un creuset intellectuel à cause de son histoire. Mais aujourd’hui, l’héritage colonial n’est visible que par les vieux bâtiments laissés par les colons et le chemin de fer qui rappelle le passé glorieux du commerce.
Cette ville très bien dotée en infrastructure scolaire est touchée de plein fouet par le phénomène de la déperdition scolaire qui touche la plupart des zones rurales. Les taux de réussite aux examens sont très faibles à tous les niveaux. «L’éducation se porte très mal dans la commune de Khombole et environ, le niveau des élèves est très faible », explique Macoumba Fall, enseignant et président de la commission éducation à la mairie de Khombole. Les causes de ce problème sont nombreuses et variées. Entre une mauvaise politique éducative de l’Etat et un bas niveau de certains enseignants, les responsabilités sont partagées.
La politique de massification que l’Etat a adoptée est décriée par les enseignants et les parents d’élèves. M. Fall juge inacceptable les directives données aux enseignants. « On nous intime l’ordre de ne pas faire redoubler un enfant en classe de CI, même s’il ne sait pas lire ». Cette politique qui vise à satisfaire les bailleurs de fonds à travers des chiffres parfois exagérés, a fini de rabaisser drastiquement le niveau des élèves à tout point de vue. Le recrutement des acteurs de l’éducation aussi est pointé du doigt. L’enseignement n’est plus un métier par option, mais un point de chute pour certains cartouchards des universités et personnes qui n’ont pas pu réaliser leur rêve d’entame.
Un instituteur qui n’a pas de niveau ne peut pas inculquer du savoir à un élève. Certains peinent à construire une phrase correcte, « ils passent tout leur temps à parler Wolof dans les classes, parfois même ils expliquent les leçons dans cette langue ». Ce constat est de presque tous les parents d’élèves rencontrés dans la ville de Mamadou Dia. Dès lors, un problème majeur se pose car comme le dit l’adage « on ne peut transmettre que, ce que l’on a ». Homme du sérail, Macoumba Fall enseigne depuis 1978. Celui qui a étudié pendant le règne de Senghor, époque où le Sénégal était une référence en Afrique et dans le monde, dresse un bilan sombre de la situation scolaire et accuse sans peine ses collègues. «L’absentéisme, les récréations prolongées et la féminisation de la profession sont entre autres les principales causes du faible niveau». Tous ces problèmes réunis, ils conduisent inévitablement les apprenants vers des échecs et vers l’abandon.
L’Ecole élémentaire Ismaël Diop a été créée en 1915. Elle a débuté avec deux classes. La première école de la commune et de toute la zone compte aujourd’hui 15 classes.  C’est avec fierté que Monsieur Sadikh Gueye, le directeur cite les personnalités qui ont eu à faire leur scolarité dans son établissement, entre autres  Mamadou Dia, Nalla Ndiaye et lui-même. Les cas d’abandon sont très élevés. «Les causes sont souvent le manque de moyens des parents d’élèves et manque d’encadrement à la maison». Le taux de scolarisation tourne autour de 70% dans la commune de Khombole avec une majorité de filles. Mais à l’arrivée, beaucoup d’élèves n’achèvent pas le cycle primaire «nous avons déjà 4 filles qui ne feront pas l’examen faute d’extraits de naissance», se désole M. Gueye.
La majorité des parents n’ont pas été à l’école. Cela entraîne un problème d’encadrement à la maison. Ainsi, les enfants sont laissés à eux même. Ils passent toute la journée à errer dans les rues et jouer au football après les cours. Ils repartent le lendemain sans jeter un seul coup d’œil sur les leçons précédentes.
Commune depuis 1925, Khombole est un symbole de la domination coloniale. Naturellement comme toute ancienne ville avant les indépendances, l’école a été très tôt installée. La commune est bien servie en infrastructures   éducatives. Elle compte 6 écoles primaires, un lycée, un collège et une école privée catholique. Malgré ce privilège, les échecs scolaires se multiplient entraînants une régression de l’enseignement du français dans la zone.
                                                                                                    Abdourahim Barry